COMPTE-RENDU DU PROCÈS DU SCANDALE DU SICTOM DE RAMBOUILLET

Publié le par ANTICOR 78

Quoi qu’il arrive, les citoyens seront grugés jusqu’au bout. 


            11 ans après la découverte des faits, le procès de l’ancien Président du SICTOM de Rambouillet et du SYMIRIS, à l’époque Maire-adjoint de l’ancien Président du Sénat Gérard Larcher à Rambouillet : Jean-Philippe Assel, a enfin eu lieu ces 17 et 18 septembre, à la 11ème Chambre du Palais de Justice de Paris.

            Jean-Luc Trotignon, responsable d’Anticor 78, était le seul élu de Rambouillet présent au procès au nom des milliers de rambolitains floués, et il vous rend compte des deux audiences de ce procès en détail ci-dessous.

C’est en effet l’un des rôles d’Anticor de communiquer sur ces affaires édifiantes, qui ne sont pas forcément relayées par les médias nationaux, afin de refuser leur banalisation, afin qu’elles servent de contrexemples, et également pour encourager les lanceurs d’alerte à agir avant qu’il ne soit trop tard. Cette affaire est malheureusement très symbolique des dérives que nous combattons, car on y retrouve une gestion calamiteuse des fonds publics par un élu, franchement délictueuse selon le Procureur, des faux en écritures, un conflit d’intérêts institutionnalisé par des élus de la région de Rambouillet, un électoralisme des plus négatifs qui a laissé se creuser un déficit masqué que des dizaines de milliers de citoyens floués ont ensuite dû lourdement éponger, une délégation de service public organisée dans un montage volontairement complexe et très difficile à contrôler, des subalternes qui n’ont pas osé lancer l’alerte au sujet de leur supérieur, une instruction d’une durée incompréhensible et qui a nettement semblé avantager le prévenu au fur et à mesure, et un prévenu qui au final rejette toute la responsabilité de sa gestion de Président de plusieurs syndicats intercommunaux sur son entourage. Bref, un cas d’école !

            Vous trouverez le résumé du fond de cette affaire en cliquant ici. Rappelons que les citoyens-contribuables de Rambouillet et alentour avaient été eux-mêmes contraints de combler le déficit de plus de 13 millions d’euros par une augmentation moyenne de 90 à 100 % de leur taxe ordures ménagères en 2002. A titre d’exemple, pour l’une des communes citée au procès (sur les 179 liées au SYMIRIS), cette taxe était passée de façon durable par foyer fiscal de 200 € en 2001, à 450 € en 2002. Les usagers en payent toujours les conséquences depuis 10 ans puisque, malgré quelques petites baisses ces dernières années, les habitants de Rambouillet payent par exemple une taxe ordures ménagères toujours 48 % supérieure à la moyenne des communes des Yvelines.

 

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Jean-Philippe Assel à son entrée dans la salle d'audience

 

PREMIER JOUR D’AUDIENCE

 

            Dès le début de l’audience, on apprenait que les très nombreux contribuables touchés seraient en tout état de cause grugés jusqu’au bout, car aucune demande de dommages et intérêts présentée au procès par les nombreuses parties civiles n’aboutira à la moindre indemnisation de la part du prévenu, quelle que soit la condamnation éventuelle, puisque Jean-Philippe Assel a déclaré au Tribunal que, depuis trois ans, il n’avait plus aucun revenu et qu’il était hébergé par ses parents à Rambouillet : il est donc insolvable…

            Le Tribunal s’est étonné du fait qu’un homme qui avait cumulé à l’époque des faits autant de fonctions, de Présidences de société, en plus de son mandat de Maire adjoint, un homme si intensément actif, puisse se retrouver depuis trois ans sans aucune activité du tout.

            Madame Selvi, juge qui rapportait l’affaire, a indiqué avec une légère perplexité que, malgré l’ensemble des faits connus, le magistrat instructeur avait abandonné les chefs de prise illégale d’intérêt et de favoritisme, pour ne conserver que ceux de faux en écritures sur 2 années de gestion. Mais elle a rappelé qu’il s’agissait de la responsabilité de ce dernier. Plusieurs avocats ont par ailleurs rappelé la longueur difficilement admissible des 11 ans de procédure, et les 8 ans d’une instruction « bâclée » ne posant pas certaines questions fondamentales, pour s’interroger sur la normalité de cette procédure qui pourrait sembler avantager l’accusé.

 

Jean-Philippe Assel rejette la responsabilité des dérives sur « les élus » et sur l’incompétence de son entourage au SICTOM et au SYMIRIS.

 

            Selon le prévenu à la barre, il était indispensable d’augmenter la taxe d’enlèvement des ordures ménagères de 10 % chaque année de 1999 à 2001 (30 % sur 3 ans) pour éviter le déficit, et cela avait été prévu au départ. Il le savait mais ce sont, selon lui, « les élus » représentant les différentes communes et siégeant au SICTOM de Rambouillet qui l’ont refusé, car ils ne souhaitaient pas cette augmentation à l’approche des élections municipales de 2001 pour des raisons électorales. Lorsqu’il est poussé dans ses retranchements, Jean-Philippe Assel parle plus précisément de la pression « des Maires », à laquelle on ne pourrait résister lorsqu’on est Président de syndicat intercommunal. Le déficit colossal, que le Maire de Rambouillet Gérard Larcher a ensuite fait éponger aux contribuables, lorsqu’il est devenu Président du SICTOM en remplacement de M. Assel, serait donc dû indirectement, selon ce dernier, à la pression des Maires des communes membres du SICTOM de Rambouillet. Lui, qui est décrit comme un autocrate affirmé de la part des témoins auditionnés pendant la procédure, veut bien seulement reconnaître qu’il a eu la « faiblesse » de ne pas démissionner alors.

            M. Assel explique également que la responsabilité de ce fiasco de gestion d’un service public est due à l’incompétence de ses subordonnés (employés comme son Vice-Président aux finances, un élu). Aucun d’eux n’aurait su appliquer la nouvelle norme de comptabilité M14, qui aurait automatiquement mis en évidence les zones dangereuses des budgets du SICTOM et du SYMIRIS. Or il se trouvait que le Maire de La Norville (Essonne, 4 000 habitants), M. Filleul, s’était lui-même déplacé à l’audience pour interroger directement M. Assel. A la Présidente du Tribunal, Madame Quantin, qui s’étonnait qu’il soit la seule partie civile présente qui n’ait pas d’avocat, il a répondu « que cette affaire avait déjà coûté assez cher comme cela à sa commune pour se payer un avocat ». Et il se trouve que ses 4 questions au prévenu, aussi simples qu’efficaces, ont contraint M. Assel à reconnaître que des formations à cette nouvelle comptabilité M14 avaient été légitimement proposées aux fonctionnaires et aux élus concernés, notamment ceux oeuvrant dans ces deux syndicats intercommunaux, et tous avaient suivi ces formations au su de Jean-Philippe Assel, sauf lui-même...

En tout état de cause, il avait la responsabilité de leur imposer d’appliquer cette M14 et, en cas de refus, de les démettre. Il a indiqué à la barre ne pas avoir voulu se mêler de ces détails de comptabilité à son arrivée, car il jugeait que ce n’était pas son rôle ni vraiment son domaine. L’avocate de l’UFC-Que choisir a cependant rappelé, comme le Tribunal, que son domaine de compétence d’origine y était tout à fait lié, puisque M. Assel est au départ titulaire d’un diplôme de comptabilité en gestion.

            Chronologiquement, M. Assel explique qu’il a été tout d’abord élu en 1989 comme simple Conseiller municipal, puis que M. Larcher lui a ensuite demandé de s’occuper des syndicats intercommunaux (dont également le SIRR qui nous a amené à Rambouillet une eau 70 % plus chère que la moyenne nationale, avec des remarques négatives de la Chambre Régionale des Comptes sur sa gestion par la suite), et qu’il a donc effectué son second mandat (1995-2001) en tant que Maire-adjoint délégué à ces syndicats intercommunaux (NDLR : il a été ré-élu par le Conseil municipal à cette fonction au début de la nouvelle mandature de 2001 à 2008, mais a fini simple conseiller municipal cette 3ème mandature). M. Assel citera plus tard une nouvelle fois M. Larcher en disant que c’est lui qui l’avait poussé, au moment où les déficits devinrent particulièrement apparents mi-2001, à ce qu’un cabinet d’audit soit saisi plutôt que la Chambre régionale des comptes directement.

            M. Assel se défend également en expliquant que, sur les années de sa Présidence du SYMIRIS, les exigences écologiques en matière de traitement des ordures ménagères sont devenues telles que les coûts ont explosé. L’avocat du SICTOM lui a rappelé que la plupart des syndicats de traitement des ordures ménagères, en France, avaient connu la même situation à la même époque, sans pour autant avoir à faire face à de tels déficits.

            Enfin M. Assel explique aussi qu’il ne pouvait gérer chaque détail de la gestion de ces syndicats, car il y consacrait déjà « 50 h par semaine » et ne pouvait donc faire plus. Le Tribunal lui a alors rétorqué d’une façon tout à fait justifiée que, lorsque l’on choisit soi-même de cumuler autant de mandats, de fonctions, c’est de sa propre responsabilité, que personne ne l’avait forcé et qu’il lui fallait donc les assumer tous.

            La plupart des témoins interrogés travaillant au service de ces syndicats pendant l’instruction ont déclaré avoir alerté M. Assel des anomalies de gestion et de leur danger légal. Ils signalent qu’il a toujours écarté des alertes. La comptable indique aussi que les observations des élus n’auraient pas été prises en compte. Son successeur au SYMIRIS signalera « une absence totale de transparence dans les comptes ».

            Cependant, Jean-Philippe Assel continue à affirmer qu’il ne se reconnaît aucune responsabilité dans cette affaire, que tout est de la responsabilité « des élus » (oubliant qu’il en était lui-même un à l’époque, et important puisqu’on disait qu’il était le bras droit de Gérard Larcher) et de l’incompétence de ses subordonnés. Le Procureur Roques finit par lui demander quelle était sa compétence à lui exactement en tant que Président du SICTOM et du SYMIRIS, puisqu’il nie toute responsabilité… Il fait également reconnaître au prévenu qu’avant de présider ces syndicats, il avait plusieurs années d’expérience de Conseiller municipal qui l’ont inéluctablement sensibilisé à la gestion correcte des finances publiques et à ses règles.

 

            Les premières plaidoiries de parties civiles de ce lundi ont souligné cette absence totale de responsabilité reconnue par Jean-Philippe Assel en quoi que ce soit, dans le fiasco de cette gestion de service public, et ont mis en exergue l’impossibilité d’avoir accepté la charge de Président de ces entités et de ne s’y reconnaître au final aucune responsabilité. Ces plaidoiries ont souligné, à la suite du Tribunal, que la défense de M. Assel, pendant les 8 années de l’instruction, n’avait jamais exigé l’audition d’aucun témoin pouvant conforter ses thèses, que cette défense n’avait non plus fait citer aucun témoin à l’audience en faveur de M. Assel, comme elle en avait le droit, alors qu’elle avait connaissance de tous les témoignages à charge enregistrés en cours d’instruction.

            Parmi ces premières plaidoiries, il y avait celle de l’avocat du SICTOM de Rambouillet. Ce dernier, pertinent sur certains points, s’est parallèlement étendu en louanges sur la gestion du Président qui a pris la succession de Jean-Philippe Assel au SICTOM de Rambouillet : Gérard Larcher, Sénateur-Maire de Rambouillet et par ailleurs en charge des affaires judiciaires du SICTOM de Rambouillet. Cet avocat a par ailleurs rappelé que c'était bien en vertu de l'article 40 du Code de Procédure Pénale que Gérard Larcher avait averti les autorités compétentes des dérives de gestion du SICTOM, c'est-à-dire par obligation faite aux élus de rendre compte des délits qu'ils peuvent constater, contrairement à certaines versions locales qui laissaient entendre que ce signalement avait été spontané, sans obligation.

            La question principale qui demeure au sortir de cette première journée d’audience est : comment Jean-Philippe Assel peut-il considérer « les élus » responsables de la non-augmentation de 10 % par an de la taxe ordures ménagères, qui aurait été prévue au départ par ces élus pour 1999-2000-2001 et qui aurait évité le déficit colossal, alors qu’il leur présentait chaque année des comptes en équilibre, donc ne nécessitant pas une telle augmentation ? Soit les comptes présentés étaient effectivement faux à l’insu des élus, soit des élus de différentes communes étaient au courant de cette inexactitude des comptes qui les arrangeaient à des fins électorales. Cette question ne sera pourtant pas évoquée par la suite.

 

 

 

DEUXIÈME JOUR D’AUDIENCE

 

            Poursuivant les plaidoiries, Maître Saint-Marc, le premier avocat du SITREVA (nouveau nom du SYMIRIS), a rappelé que les anomalies de gestion du SICTOM de Rambouillet et du SYMIRIS, sous la présidence de Jean-Philippe Assel, ne se résumaient pas aux comptes annuels donnant de fausses informations qui sont l’objet du procès. Il a rappelé l’absence d’un état des actifs, d’un état des engagements de dépenses, le gonflement de la masse salariale de 10 à 22 millions de francs en quelques années… Il a expliqué le système des emprunts contractés pour des investissements pas réalisés, car ils servaient en fait à combler les déficits de fonctionnement (NDLR : les magistrats de la Chambre Régionale des Comptes ont dénoncé exactement le même système dans la gestion du SIRR (assainissement), que Jean-Philippe Assel présidait aussi à l’époque). Ce qui fait qu’à l’arrivée, lorsque de réels contrôles ont commencé à être exercés en 2001, « à chaque coup de pioche que l’on donnait dans la montagne des dettes, on en découvrait de nouvelles ». Le Tribunal d’Orléans a fini par reconnaître un déficit accumulé de 13, 6 M€.

Pour Maître Saint-Marc, le fait, pour Jean-Philippe Assel, de ne se reconnaître aucune responsabilité dans ce fiasco financier, correspond à une demande d’immunité pénale inacceptable, car il ne peut s’exonérer de ses responsabilités, même s’il a délégué certaines de ces responsabilités à son Vice-Président, car un délégué ne peut agir légalement que sous la surveillance et l’autorité de celui qui délègue.

 

            Le second avocat du SITREVA, Maître Drai, a dénoncé une instruction « en entonnoir » où plus on avançait, plus le nombre de personnes pouvant être mises en cause et plus les chefs d’inculpation se sont réduits, jusqu’à se résumer à un seul prévenu, Jean-Philippe Assel, mis en cause pour un seul chef d’inculpation : faux en écriture. Pour lui, d’autres personnes, « proches de M. Assel », auraient dû également se trouver sur le banc des prévenus à ses côtés.

            Comment, par ailleurs, la prise illégale d’intérêt a-t-elle pu être écartée, quand on comprend que ce montage syndical complexe, décidé par les élus de la région de Rambouillet, faisait de M. Assel, Président du SICTOM de Rambouillet (collecte des ordures), le débiteur de M. Assel, Président du SYMIRIS (valorisation des déchets), lui-même créancier du SICTOM ?… Et bien évidemment, dans ces conditions, M. Assel-Président du SYMIRIS n’a jamais exigé de M. Assel-Président du SICTOM le remboursement des 32 millions de francs dus par le SICTOM au SYMIRIS.

            Les choses étaient d’autant moins transparentes que, selon plusieurs témoins concordants, lorsque des factures arrivaient, c’est M. Assel lui-même qui en faisait un tri préalable et qui indiquait celles que l’on réglait et celles qu’il décidait de lui-même que l’on ne réglait pas, « pour cause de litige », en refusant qu’on les enregistre même dans la comptabilité. Mais ces litiges n’ont jamais donné lieu, pendant la Présidence de M. Assel, à aucun contentieux pour factures impayées, jusqu’à ce que les montants deviennent beaucoup trop considérables et soient tout à coup révélés par l’une des sociétés créancières.

            Maître Drai a ensuite mis en lumière les incohérences de la défense de M. Assel. Ce dernier avait hier bien expliqué à la barre qu’aucun déficit ne serait apparu si « les élus » avaient accepté l’augmentation, qui aurait été prévu à la base, de 10 % par an de la taxe ordures ménagères des contribuables, et qu’il savait qu’il aurait dû l’appliquer mais que « les élus », voire « les Maires » de ces syndicats intercommunaux, n’avaient pas voulu en entendre parler à l’approche des élections municipales de 2001. Mais il n’avait pas indiqué au Tribunal qu’a contrario, il ne l’avait non seulement pas augmentée, mais qu’il avait fait voter l’inverse ! Le taux de la taxe ordures ménagères avait en réalité été diminué de plus de 10% de 1999 à 2001. Ne pouvant moi-même adhérer à cette façon de présenter les choses au Tribunal, j’ai apporté ce 2ème jour du procès, en tant qu’usager du SITREVA à l’époque et du SICTOM de Rambouillet, et en tant que citoyen-contribuable et élu de la ville de Rambouillet, mes avis d’imposition prouvant cette diminution contradictoire de la taxe sur ces années à Maître Drai, qui en a fait part au Tribunal et les lui a remis.

            Au sujet de l’absence de revenus de M. Assel depuis 3 ans, censée l’empêcher de régler les moindres dommages et intérêts aux parties civiles, ou la moindre amende, il a par ailleurs fait remarquer que celui-ci avait été assisté pendant toute la procédure (11 ans) d’un avocat, sans avoir fait appel à l’aide juridictionnelle réservée à ceux qui n’ont pas suffisamment de revenus pour payer un avocat. M. Assel ayant indiqué être hébergé à Rambouillet chez ses parents, il a par ailleurs révélé que les services fiscaux lui avaient adressé un courrier le 27/8/11 à cette adresse, qui était revenu avec la mention de la Poste : « N’habite pas à l’adresse indiquée ». Il a souligné que M. Assel n’avait demandé ni le RMI, ni le RSA, ni aucune pension à laquelle il pourrait prétendre, et qu’il ne s’était pas inscrit à Pôle emploi, ce qui soulève bien sûr la question de la sincérité de son insolvabilité.

            Et c’est à cause de celle-ci que Maître Drai a demandé au Tribunal de se concentrer sur l’exemplarité de la peine qui, au minimum, doit servir à dissuader d’autres élus tentés par des dérives profitables dans la gestion de l’argent public.

 

            Puis le Procureur Roques a entamé son réquisitoire en expliquant que, malgré l’éloignement de cette affaire dans le temps, il fallait garder à l’esprit sa gravité, toujours pertinente. Il a indiqué comprendre la frustration des parties civiles due à ces 11 ans de procédure et à l’élimination de plusieurs chefs d’inculpation en cours de route.

            Il a souligné le fait que, non seulement Jean-Philippe Assel ne se reconnaît aucune responsabilité dans cette gestion désastreuse des syndicats qu’il présidait, mais qu’il n’en avait jamais exprimé aucun regret et qu’il continuait à l’audience.

            Il a rappelé le nombre de témoignages à charge concordants enregistrés sous serment pendant l’instruction, témoignages que le prévenu ni son avocat n’ont pas essayé d’infirmer pendant les 8 années correspondantes, que ce soit verbalement, par demande d’actes, de confrontations, d’auditions de personnes qui auraient pu témoigner favorablement à son avantage, etc… Pour le Procureur, il y a bien atteinte à la probité publique, à la crédibilité de la parole publique, et l’attitude de Jean-Philippe Assel, élu important depuis des années dans le Sud-Yvelines, a sali l’image des élus dans leur ensemble. Il rappelle que la mise en place de la nouvelle comptabilité M14 des collectivités territoriales, à travers laquelle M. Assel justifie une bonne partie des dérives, existait depuis 1994, et qu’elle avait été généralisée en France en 1997, soit un an avant qu’il ne devienne Président du SITREVA, et que tout son entourage avait bénéficié de la formation à cette nouvelle comptabilité.

            Le Procureur a bien voulu reconnaître que l’approche des élections municipales de 2001 avait malheureusement influé sur le cours des choses, dans un électoralisme regrettable des élus en place qui ne favorisait pas l’augmentation nécessaire de la taxe ordure ménagères avant ces élections. Mais pour lui, le 1er de ces élus qui avait alors été favorisé était bien M. Assel lui-même qui, non seulement s’est fait ré-élire comme Maire-adjoint de Rambouillet en 2001, mais s’est aussi fait re-désigner aussitôt après ces élections Président du SICTOM, du SYMIRIS, de la SEM Tremplin, du SIRR… où les indemnités s’accumulaient pour lui.

            Rappelant au final que les déficits masqués étaient principalement financés par le non-paiement des factures dues, et que l’ordonnateur, le donneur d’ordres, était bien de par la loi Jean-Philippe Assel, il a réclamé au Tribunal la reconnaissance de sa culpabilité, 3 ans d’emprisonnement avec sursis, 10 000 € d’amende, l’interdiction de ses droits civiques et familiaux et l’interdiction d’exercer une fonction similaire à celle qui lui a permis de commettre ce qu’il affirme être des délits.

 

            Puis vint le tour de l’avocate de M. Assel, plaidant avec la conviction du mauvais quart d’heure à passer, qui a indiqué que toutes les prestations payées par la suite, à partir de 2002, par les dizaines de milliers de contribuables usagers du SYMIRIS et du SICTOM, l’ont été pour des prestations qui avaient dans la réalité été fournies plus tôt, mais sans être rémunérées : il n’y avait donc pas de détournement de fonds ni d’enrichissement personnel (NDLR : peut-être, mais prestations fournies à quel prix injustifié ?...).

            Elle a ensuite affirmé que l’usine de traitement des déchets de Valoryèle (société liée à Suez), qui a coûté largement plus que prévu, n’avait rien coûté aux contribuables, déclenchant le seul rire collectif et spontané de la salle dans ce procès. Elle voulait signifier par là qu’au moment de la construction, les contribuables n’avaient pas eu à débourser, car le contrat a finalement prévu une part de la TEOM qui revenait à Valoryèle en remboursement sur 20 ans, contrat qualifié de léonin par certaines parties civiles et notamment à l’époque par Alain Le Vot, Maire-adjoint de Magny-les-Hameaux (78). Elle précise au sujet de Valoryèle que M. Assel a refusé de signer l’un des avenants alors débattus, parce qu’il s’agissait de reconnaître un effet rétro-actif sur le contrat, reconnaissant par là-même, malgré les dénégations de son client, qu’il était bien en pouvoir de décision sur tout ce qui concernait les engagements du SYMIRIS…

            Elle a expliqué que si le SYMIRIS avait eu des problèmes, c’était parce qu’il s’était développé trop vite. Elle a indiqué que Jean-Philippe Assel n’était pas le seul décisionnaire, que les comités syndicaux votaient les décisions, que les Commissions les approuvaient (NDLR : on sait tout de même comment un Président d’Assemblée peut influencer les votants, notamment lorsqu’il représente la ville de loin la plus importante et qu’il est décrit par tous comme un autocrate affirmé).

            L’avocate de M. Assel a également affirmé que, si certaines factures étaient « bloquées », c’est que ce dernier indiquait à ses subalternes que les prestations fournies ne correspondaient pas à la commande initiale.

            Elle rappelle que « dès que M. Assel a été informé d’anomalies » par de nouveaux collaborateurs, il a alerté les autorités compétentes, soit avril 2001 pour le SYMIRIS et juin 2001 pour le SICTOM de Rambouillet. Rappelons qu’avril 2001, c’est au lendemain des élections municipales de mars 2001, et que c’est donc à ce moment-là, une fois les résultats des élections municipales acquis, que les révélations fleurissent…

            L’avocate de M. Assel finit par admettre qu’il « est possible qu’il y ait eu des atermoiements », « peut-être éventuellement des erreurs de discernements », ayant sans doute compte conscience en fin de procès que les positions de son client ne sont pas tenables face à un Tribunal lucide.

            Elle a indiqué au final que son client était diabétique, comme il l’avait indiqué lui-même, ce qui pouvait expliquer le fait qu’il n’ait aucune activité depuis 3 ans.

            Elle conclut donc à la relaxe de son client, en explicitant qu’il n’y a aucun préjudice moral à assumer à l’égard des Maires et des élus, car tous ces élus le désignent comme un bouc émissaire et se font passer pour ceux qui ont redressé la situation, donc se valorisent auprès de leurs électeurs, oubliant leur propre responsabilité d’avoir mis en place M. Assel et leur propre responsabilité de lui avoir confirmé leur confiance par leurs votes sur plusieurs années.

 

            Quelles conclusions ?

 

L’ensemble des parties civiles présentes au procès a estimé que les réquisitions du Procureur étaient en-dessous de ce qu’aurait dû réclamer un représentant du Ministère public. Avec une amende éventuelle que M. Assel ne règlera jamais, vu son auto-déclaration d’insolvabilité, avec une demande de peine avec sursis pour sa responsabilité d’au minimum 13 M € de déficit reconnu par des Magistrats, et volontairement masqué selon le Procureur, M. Assel peut s’estimer soulagé si le Tribunal ne va pas au-delà (ce qui est le cas la plupart du temps). Tout comme l’instruction qui a semblé l’avantager, comme souligné par plusieurs voix au procès, les peines réclamées sont peu de choses face aux 90 à 100 % d’augmentation de la taxe d’ordures ménagères, à laquelle des dizaines de milliers de contribuables, totalement innocents de cette gestion, ont été, eux, réellement condamnés à payer pour des années.

Et nous en payons encore les conséquences 10 ans après, puisqu’à Rambouillet, par exemple, malgré de petites baisses ces dernières années, la taxe ordures ménagères est toujours 48 % supérieure à la moyenne de celle des communes des Yvelines (chiffres de l’Observatoire des déchets d’IDF).

 

Tout au long de son procès, Jean-Philippe Assel n’aura pas eu un seul mot de regret pour toutes les victimes de cette gestion déplorable de l’argent public, qu’elle soit délictueuse ou non, comme le dira le Tribunal le mercredi 24 octobre prochain.

 

 

 

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E
Enfin un procès...Il sera reconnu coupable et sera condamné.<br /> Bien sûr, il n'y a aucun chance jamais, qu'il rembourse les 13 Millions d'Euros aux personnes flouées.<br /> Sa peine sera légère, car qu'en a t-il à faire d'une peine de prison avec sursis. Pourquoi, travaillerait il aujourd'hui, pour que son salaire parte en indemnisation?<br /> Donc, il préfèrera vivre du RMA...et vous verrez que dès que l'on ne pourra plus recouvrer les sommes (5ans, je crois) il retrouvera un travail, bien rémunéré.<br /> Je vous propose une autre solution: S'il est condamné au pénal, et selon toute vraisemblance il le sera, il faut aller au tribunal civil, le faire condamner à rembourser...et là, quand ce petit<br /> monsieur touchera sa retraite, on pourra la lui prendre (sauf le montant du RMA). C'est certain, il ne remboursera jamais, mais il faut poursuivre, c'est le seul moyen qu'il ne dorme jamais en<br /> paix!!!
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